La société de consommation nous pousse à croire qu’acheter toujours moins cher, c’est possible sans concessions. Je ne pense pas que ce soit le cas.
Green shower
J’adore le thé
J’avais pour habitude d’en consommer une grande quantité, tout au long de la journée. Je faisais couler de l’eau que j’oubliais de servir, puis je buvais mon thé bon marché tiède en faisant autre chose, jusqu’à être surpris par la fin de ma tasse.
Jusqu’au jour où j’ai décidé de me renseigner sur cette boisson, étant donné la quantité que j’en ingurgitais chaque jour. Et je me suis rendu compte que mon thé contenait des pesticides, que les sachets polluaient l’eau d’infusion, et qu’en plus de ça, les personnes qui le récoltaient le faisaient dans des conditions déplorables.
Vous pouvez rire ; c’était il y a quelques années, et ces problématiques ne m’étaient pas familières.
J’ai donc décidé de chercher des marques de thé plus éthiques dans tous les sens du terme : moins de pesticides, moins de sachets en plastique, plus de droits pour les travailleurs.
Sauf que cette éthique a un coût. Et je ne parle pas du surcoût imposé par certaines marques pour surfer sur la tendance, mais bien du coût réel que possède une plante récoltée en grandes quantités à l’autre bout du monde, séchée et acheminée jusqu’à mon logement. Il est impossible de réaliser toutes ces opérations pour moins de 1 € la boîte de 20 sachets !
Ma décision face a ce nouveau prix n’a pas été d’arrêter le thé, mais de lui redonner la place qu’il mérite : c’est une boisson chère, qui doit être dégustée à sa juste valeur.
Je le consomme donc désormais avec parcimonie, bien assis dans un fauteuil, à discuter ou simplement à rêvasser en appréciant la chance que j’ai de pouvoir m’en offrir.
Et si j’ai juste envie d’une boisson chaude pendant que je travaille… je bois une tasse d’eau chaude.
Le vrai prix des choses
Les industriels et les marketeux nous ont fait croire que l’on pouvait avoir de la bonne qualité, éthique, à bas coût. C’est faux.
Un smartphone construit avec un bon trilliard de matériaux précieux ne peut être à bas prix qu’en écrasant des travailleurs.
Un morceau de jambon ne peut coûter moins cher qu’une baguette de pain et provenir d’un cochon heureux ayant mangé des produits naturels en batifolant dans un pré.
Des produits bio récoltés main à l’autre bout du monde ne peuvent coûter le même prix qu’une salade cueillie à 1 km.
Un meuble en bois brut fait main par un artisan ne peut être bon marché.
Sans mauvais jeu de mots, le bas coût a un prix. Le premier levier permettant de réduire les coûts est l’achat en gros. Mais ce levier a des limites, qui ont été pulvérisées il y a bien longtemps, aux prémices de cette course à l’éco+.
Pour faire baisser les prix, il est alors obligatoire d’influer sur d’autres aspects du produit :
- baisser sa qualité,
- ou baisser le coût de la main d’œuvre.
La baisse de qualité a été la première stratégie des marques « premiers prix ». Et elle a payé !
Les produits étaient plus simples, moins performants, mais tout le monde savait ce qu’il achetait. Cela a permis à des personnes de consommer avec peu de moyens.
Mais, dans cette utopie de croissance infinie, les produits peu cher de mauvaise qualité n’avaient pas leur place. Les industriels voulaient des prix plus bas pour la même qualité apparente.
Les industriels ont créé de nouvelles manières de faire baisser les prix, mais ces dernières sont cachées autant que possible aux consommateurs :
- exploiter la main d’œuvre,
- élever des animaux dans des conditions impensables,
- compenser le manque de qualité par des additifs,
- utiliser des produits chimiques pour produire de plus grandes quantités,
- ne pas dépenser d’argent dans des conneries telles que le recyclage ou le traitement des eaux usées,
- <liste à compléter avec les scandales à venir>.
Ainsi, il n’était plus question de consommer moins cher pour subvenir à ses besoins, mais de consommer moins cher pour consommer plus, de tout, dans tous les sens.
Quoi qu’on fait, nous ?
Il n’est pas question de se priver de produits que l’on aime si on peut se les permettre. Le problème, c’est la banalisation de produits qui ne le sont pas. Surconsommer des produits précieux ne mènera jamais à rien de bon. Dans le meilleur des cas, on se fait du mal à soi-même — et c’est bien fait pour notre gueule — et dans le pire on fait du mal à d’autres êtres vivants que les industriels nous cachent avec cynisme.
Lorsque j’achète un produit, j’essaie d’avoir le raisonnement suivant :
- combien cela coûte-t-il pour avoir un produit éthique et de qualité ?
- combien suis-je prêt à dépenser pour ce produit ?
Ces deux questions me permettent de choisir mon comportement :
- C’est bon marché et de qualité, alors je peux en consommer beaucoup.
- C’est cher, mais j’aime réellement ça, alors j’en consommerai avec modération et attention.
- C’est cher, et je ne suis pas prêt à y mettre ce prix.
Ce raisonnement pousse à faire passer le besoin en premier. Il évite les achats compulsifs, uniquement motivés par un bas prix.
Et en bonus, ça fait chier les industriels.
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